La crèche provençale est un incontournable du pays. Pas un village, pas une église qui n’ait la sienne, toutes rivalisant d’ originalité et de beauté.
Autant de santoniers que d’ interprétations de la Nativité, de chaque personnage représenté.
En l’église Saint-Louis d’Hyères, la crèche est sans conteste l’une des curieuses de la côte varoise. Il faut dire que les santons sont grandeur nature ou presque. Ils ont été façonnés par un curé il y a juste un siècle.
Un des santons mérite une attention plus particulière. Il ne semble pas être de la main du curé et nul n’en sait exactement d’où il vient. Il s’agit d’un des bergers.
Cette figure est on ne peut plus commune avec des versions différentes: en premier lieu, le berger appuyé sur un bâton est un homme jeune. Il porte une gourde et une musette avec son repas. Il est vêtu d’une culotte de gros drap, des guêtres de peau recouvrant ses souliers. Il porte une longue cape de bure (limousine) sur les épaules et un chapeau de feutre noir à large bord.
Ensuite, le berger vieux à barbe blanche s’ appuie lui aussi sur un long bâton. Même cape de bure sur un pantalon rapiécé et chapeau noir. Le troisième porte un agneau sur les épaules. Le berger à genoux est arrivé dans l’étable et , lui aussi, porte la cape. Quant à la bergère, elle est vêtue de brun avec une cape recouvrant la tête et les épaules. Elle apporte un agneau à l’enfant Jésus et tient une badine à la main.
Ces bergers sont des personnages mystérieux qui parlent peu mais en savent beaucoup sur les choses de la nature. Ils connaissent notamment les secrets tant des plantes que des étoiles. L’évangile de Saint-Luc les désignent clairement comme des envoyés divins: « Or, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, les bergers se dirent entre eux: Allons donc à Bethléem et voyons ce qui est arrivé… »
Mais celui qui requiert toute votre attention, c’ est le berger couché, autrement appelé l’ incrédule. Il est entouré de brebis qui paissent au flanc de la colline et semble indifférent à l’ animation générale. Il roupille du sommeil du juste alors que tous ses collègues ont entendu l’appel des anges. Pas lui.
Lui, il continue de rêver à sa belle. Oh certainement pas la prétentieuse arlésienne, l’Arlatenco », la jeune paysanne aisée, la Mireille, au châle blanc brodé, au large jupon et à la coiffure en chignon compliqué. Pas même la bouquetière, la marchande de fleurs ambulante avec sa coiffe de coton blanc et ses ciseaux attachés à la taille, pas plus que la Comtadine aux fruits, marchande de quatre-saisons , celle qui vient des environs d’Avignon pour vendre ses gros melons d’hiver.
Non, celle qui le fait rêver, c’est tout simplement la ravie (la ravido), la servante de ferme, un peu naïve et simple d’esprit, toujours souriante, levant facilement les bras au ciel pour traduire ses émerveillements naïfs. Sans-le-sou, à peine une faire-valoir. Et pourtant…
L’Ange n’osa pas le déranger. Il ne voulut pas interrompre un si beau rêve et se dit , qu’un peu plus tôt , un peu plus tard, il n’y avait pas tant d’urgence à annoncer la naissance du Christ… Point besoin de remue-ménages. Ni de jouer au rabat-joie. Les prétendus songe-creux ont rendez-vous avec les étoiles.
Tel Booz endormi, l’incrédule continua de sourire béatement, à mille lieues d’imaginer qu’il serait en retard avec ce rendez-vous de l’Histoire… Quand le fou fait preuve de sagesse, le sage cache sa folie… répètent les étoiles de bouche à bouche, de bouche-à-oreille, par ouï-dire : autant en emporte la Voie lactée.
https://maitrerenardinfo.wordpress.com/2017/03/12/agenda-critique-…vis-de-la-creche/
Commentaires sur: "Agenda critique de Mars: Les ravis de la crèche" (11)
Un beau rêve vaut tous les rendez-vous de l’histoire ; très belle histoire santonesque (je n’ai pas dit san-antonionesque 🙂 ). Mais au fait, faudrait que je songe à me demander ce que je vais raconter, moi…
Une sirène folle? Une autre douce folie? Le Karaboujtan en folie? Les folles heures du Maharadja des Neiges?
Extra ! dire que je n’ai jamais entendu parler de ce santon là ! Lou ravi chez nous à les bras en l’air et l’air extasié du ravi mais sans doute pas cet art de la sieste appliqué; ou cet art appliqué de la sieste !
En fait, c’est le même, dans une autre position. C’est celui dont l’esprit est ravi par le Ciel, Dieu, qui est littéralement dans les nuages, qui rêve, l’idiot du village, le simplet…
Celui qui applique le :pour vivre heureux vivons couchés ?
A deux surtout. la gente féminine a souvent l’équipement nécessaire pour remplacer deux oreillers moelleux….Je sens que je vais encore me faire des amies…
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Oserais-je dire que c’est ravissant? OK, je sors…
Mais auparavant, je tiens à dire que j’ai beaucoup aimé ce texte.
Mo
Ca tombe bien: je l’aime bien aussi. On est deux, youpi!
Un sacrée bande de ravis que tu nous as dégotté là …
J’en suis toute estransinée, voire escagassée comme aurait dit ma grand mère, Henriette, fille de Rose et petite fille de Mireille ….
Bises
Comme ça fleure bon la Provence!