S'il te plaît, apprivoise-moi…

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Nouvelle de la Saint Valentin 2016: Les Siamoises de Belleville (5ème partie) par Mariessourire et Maitre Renard

 

Edgar en était là dans ses pensées quand Line dit à sa jumelle :

« Bon, ok, il nous aime toutes les deux. Et tu l’as chouffé la première, d’accord…

– Eh oui, toutes les deux. T’as vu le temps que ça lui a pris pour nous le dire ?

– Ouais… J’sais pas trop c’qu’on peut faire de lui, là ?

– Ouais… C’est la dèche ! Tiens, ça me fait penser à Gudule, tu t’rappelles de ce marteau ? Ce qu’on a pu rigoler !! Il s’était maqué avec Acacia et Pimprenelle, en même temps, mais elles n’étaient pas au courant… Le foin que ça a fait ! »

Elles parlaient librement devant Edgar, semblant oublier sa présence. Il se demandait s’il n’était pas en train de devenir fou. Pire que l’enfer… Pire que le plus cauchemardesque des cauchemars, les siamoises de Belleville…

Son cœur battait sur un rythme fou, saccadé. Edgar n’arrivait pas à rassembler ses idées. Et elles, après s’être battues, elles papotaient comme si rien ne s’était passé… et surtout comme s’il n’était pas là, comme s’il n’avait pas montré son âme et son cœur à ces demoiselles très loin d’être en détresse.

Un « boloss» comme elles disaient, voilà ce qu’il était…

Désespéré, il fit mine de partir mais se ravisant, il se retourna et les regarda comme s’il ne devait plus jamais les voir.

Aussitôt Line leva la patte en direction d’Edgar qui s’immobilisa.

« Où tu vas comme ça ? On n’en a pas fini avec toi ! lui dit-elle.

– Moi ? Où vais-je ? Mais je rentre Miss, j’ai bien compris que vous continuez de vous gausser de ma personne. Allons, soyons sérieux, j’ai eu tort de me confier à vous. Je ne fais que semer pagaille et dispute entre vous. Oubliez donc tout ce que je vous ai dit. Cela est bien mieux ainsi…

– Non, rétorqua Cora. On n’oublie rien !

– Et toi tu restes là ! » rajouta Line un brin mystérieuse.

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Edgar en resta les yeux ronds comme ceux des hiboux, les pattes sciées, le souffle coupé. Mais qu’avaient-elles donc dans la tête ? Voulaient-elles lui faire perdre la tête ? Il se sentait complètement perdu. Ses clignotants internes étaient passés au rouge vif, lui demandant de reprendre le cours des choses de façon normale. Il avait bien eu tort de leur parler à cœur ouvert, s’étant mis dans une position très délicate. Mais il y avait pire encore.

Sa réaction primitive quand Line était venue l’effleurer toute en sensualité l’avait surpris. En temps normal, il aurait sauté sur l’occasion, ne laissant aucune chance à la minette de sortir de ses griffes. Et là, il s’était écarté, gêné par ce qu’elle lui offrait… Que lui arrivait-il ? Pourquoi rien ne se passait comme prévu ?

Les siamoises l’empêchèrent d’aller plus loin dans sa réflexion. Elles avaient la tête de chats comploteurs dans l’ombre, leur tête des mauvais coups. Elles chuchotaient entre elles. Edgar tendit ses oreilles pointues en leur direction mais il ne réussit qu’à entendre des chuintements. Il fallait qu’il parte maintenant, et la tête haute lui !

« Mes beautés, je vois bien que je vous ai contrariées. Je vais vous laisser à présent. Permettez-moi de vous présenter mes hommages et de partir loin de votre vue. Il me semble que c’est la seule option envisageable avant que d’autres paroles malheureuses ne fussent prononcées entre vous et moi…
– Non, chat n’va pas être possible ! lui répondit Line, dans un battement de cils. On a pris une décision, moi et Cora. Et ne reste pas planté là comme un é-chat-las, viens donc ici !
– Permettez-moi de vous opposer un refus, Miss, je n’irais pas plus loin dans votre direction.
– C’est pas c’que t’imagines, on va pas te sauter dessus, m’enfin ! Non, au contraire : nous, on a un code d’honneur : c’est la première qui le voit qui l’a ! On s’est toujours dit qu’on ne sortirait jamais avec le même matou, question de principe entre nous, tu vois ?
– Magnifique ! Serai-je un objet à vos yeux ? Et non un matou, un vrai, un pur, un tatoué ?
– Qu’est-ce que tu jacasses quand tu t’y mets ! Rien à voir ! Allez ramène tes fesses ! Lui dit Cora, avec un sourire enjôleur, tu ne crains rien là, enfin pas pour le moment… »

Nouvelle de la Saint Valentin : Les Siamoises de Belleville (4ème partie) par Mariessourire et Maitre Renard

Line poussa de la patte sa jumelle, un air de défi dans ses pupilles rondes. Cora réagit aussitôt :  

 

« Ah non alors, même pas en rêve ! Que t’aies faim, c’est pas mon problème ! Il a dit nous, pas toi ! 

 

– Ah ouais ? Parce que tu le crois en plus ? Et que tu te crois la plus canon ? Mais que dalle ma vieille ! C’est moi qu’il a regardé quand il a causé en angliche… » se pavana Line, toute à son plaisir de faire bisquer sa sœur. 

 

Edgar toussota, très gêné d’assister à cette scène mais déjà il n’existait plus à leurs yeux.  

Cora essayait en vain de raisonner Line, mais cette dernière, ravie de jouer la provocation, en rajoutait à chaque fois davantage. 

 

« Ce que tu peux être lourde, ma pauvre fille, râla Cora. Même que ça m’en frise les moustaches ! 

 

– Faut vraiment que t’ailles voir ailleurs si j’y suis, parce que là je suis très occupée » lui répondit sa sœur en se dirigeant vers Edgar. 

 

Une Line aguicheuse vint mettre la touffe qui lui servait de queue sous les babines d’Edgar, lequel se mit à rougir instantanément tout en faisant un écart. 

 

« Miss, je vous en prie, je ne suis pas celui que vous croyez que je sois ! Votre sœur a parfaitement raison, c’est vous deux que j’aime, et non l’une plus que l’autre. Vous formez un tout si délicieusement indissociable que je ne pourrais… » 

 

Edgar s’interrompit : Cora venait de sauter sur sa sœur, toutes griffes dehors ! Il put admirer la parfaite maîtrise de la technique dite « de peignée » qu’avaient les deux minettes. C’était à tel point qu’il ne pouvait plus du tout les distinguer l’une de l’autre ! Déjà qu’en temps normal, c’était difficile ! 

Des touffes de poils semblaient sauter d’on ne sait où, et les feulements de colère ne substituaient qu’aux cris de joie. 

 

« Mes beautés, je vous en prie, calmez-vous ! Essayons de miauler comme les chats civilisés que nous sommes ! » dit Edgar, voulant calmer le jeu. Mais tout ce qu’il réussit à obtenir, c’est une mêlée tourneboulée remplie de jurons qui venaient lui écorcher les oreilles. 

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Alors il se jeta dans la bataille, voulant les séparer. Il dut user de toute sa force de matou courageux, récoltant griffures et morsures. Et au moment où il s’y attendait le moins, les deux s’arrêtèrent en même temps. Elles remirent en ordre leur pelage méthodiquement, s’aidant mutuellement à coup de langue vigoureux mais ô combien tendres. 

 

Edgar vivait un cauchemar sans nom. C’est sûr, il allait se réveiller ! Rien ne se passait comme il l’avait imaginé, et même dans son imagination la plus terrible, il n’avait osé penser vivre cet enfer émotionnel. Rien n’allait plus. Elles s’étaient sévèrement disputées et là, sous ses yeux ébahis, elles semblaient se réconforter mutuellement.  

Qu’en penser ? Que faire ?

( à suivre)

*

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MARIESSOURIRE ESSENCE D’ÉMOTIONS

L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien que par le coeur…

Nouvelle de la Saint Valentin : Les Siamoises de Belleville (3ème partie) par Mariessourire et Maitre Renard

 

Décidément ces filles étaient un cauchemar. Mais pas seulement.  

«  Vous avez tout de même daigné vous intéresser à moi quand je vous ai demandé : « Puis-je vous être utile ? » Vous sembliez un peu perdues… 

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– Nous ne sommes jamais perdues. Nous sommes nées ici. C’est notre territoire. 

– On le connait comme les poches que tu as sous les yeux. Mais nous avons été sensibles à ta proposition. On avait peut-être un petit coup dans le nez et on est assez grandes pour nous défendre… A la limite, celui qui craignait, c’était toi…  

– Mais je suis un gentleman, vous le savez. Je vous ai invité à dormir dans mon château, mon si doux foyer.  

– C’est vrai que tu ne t’es pas moqué de nous. Nous avons roupillé comme des reines. C’est très cosy et très confortable chez toi, avec feu de cheminée et tout et tout… 

– On s’est dit qu’après tout, tu n’étais pas si cave que ça, un pauvre branque et que tu pourrais toujours resservir. 

– Trop aimable !

– Voyons, ne te fâche pas. C’était presque un compliment. Tu sais, à Belleville, il n’y en a pas beaucoup des comme toi. Nous sommes cash, directes mais il n’y a pas de malice. Enfin, ce qu’il faut… Ne pars pas en vrille à tout bout de champ… Un peu d’humour et d’autodérision, que Diable. Tu as toujours l’air coincé, rigide comme si on t’avais collé un balai dans le troufignon : détends-toi, cool, respire: on ne va pas avaler ton ronron… 

– Vous savez, je crois que vous avez raison et votre remarque m’aide un peu. Je n’arrive pas moi-même à comprendre ce qui m’arrive. C’est si étrange, si irrationnel. Même si je n’avais aucun atome crochu pour vous au début, vous avez su piquer ma curiosité et -oserai-je l’avouer?- m’attendrir, puis finalement me faire craquer. In short, I love you. Je crois. désolé. 

– Pourquoi en short ? dit Cora 

– Idiote, c’est de l’angliche. En bref, il nous aime, expliqua Line. 

– Il aime qui ? Toi ? Moi ?  

– L’une et l’autre je le crains, ajouta Edgar en baissant les yeux.  

Toutes deux se regardèrent et se mirent de conserve à pouffer de rire. 

« Ca, c’est la meilleure ! 

– Celle-là , tu nous la copieras ! »

Cora et Line se regardèrent n’en croyant pas leurs moustaches. Ce beau matou qu’elles avaient essayé d’épingler à leur tableau de chasse, était à leurs pieds. Chat alors ! Et c’est au moment où elles ne le calculaient plus qu’il se déclarait… et quelle déclaration ! 

Line poussa de la patte sa jumelle, un air de défi dans ses pupilles rondes.

 

( à suivre)

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MARIESSOURIRE ESSENCE D’ÉMOTIONS

L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien que par le coeur…

Nouvelle de la Saint Valentin: « Les Siamoises de Belleville » de Mariessourire et Maitre Renard (1ère partie)

Les Siamoises de Belleville

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« J’ai une déclaration à vous faire, indiqua gravement Edgar, dans son plus soyeux costume roux, brossé avec le plus grand soin pour la circonstance. J’ai une déclaration difficile à vous faire, sans doute la plus compliquée que je n’ai jamais eu à faire jusqu’ici. Je n’ai guère l’habitude des mots.  

Vous avez beau vous-même vous gausser gentiment de moi, en faisant patte de velours, de ma bonne éducation, de ma délicatesse d’un autre temps comme vous vous plaisez à me le répéter, bref de ma maladresse, de ma timidité sans doute, de ma naïveté congénitale peut-être ; mais  ce que j’ai à vous avouer ne saurait être différé davantage. Me voici au pied du mur et de la gouttière. » 

 

Son auditoire cacha à peine sa surprise. Avec lui, on pouvait s’attendre à tout. Edgar était décidément trop chou à force d’hésitations protocolaires, de tergiversations à répétitions, d’atermoiements et de bienséance surannée. Et d’ouvrir des quinquets comme des soucoupes , de pointer les oreilles comme des radars espions pour ne pas perdre une miette après ce préambule alambiqué.  

 

« Vous n’ignorez pas combien notre rencontre fut accidentelle, imprévisible, improbable même. Jamais je n’ai imaginé rencontrer des êtres comme vous. Mon monde est délicieusement casanier, sédentaire comme si le summum de l’existence consistait à ronronner au coin d’un doux foyer. Votre monde à vous n’est qu’aventure, courses folles, vadrouilles. Mais ce soir-là, allez savoir pourquoi, je n’avais pas envie de dormir et j’allais contempler philosophiquement la lune  bosse sur la terrasse. C’est alors que je vis passer votre ombre, que je la vis glisser comme Fantômette, sans un bruit, sans même un frémissement, entre chien et loup. 

 

Tout aurait pu en rester là. Tout aurait dû en rester là.

 

(à suivre)

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