S'il te plaît, apprivoise-moi…

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Image du jour: « Je suis à plat: si vous saviez ce qu’on peut s’emmerder sur la banquise…C’est pas oursin! »

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Nouvelle: « Je suis le vent » de Carine, blog é(mots)tions

 

Arbre Branches Silhouette

Je suis le vent. Ça fait un moment que je l’ai compris. Plus j’y réfléchis et plus j’en suis convaincu. Je suis transparent, c’est indéniable. Prenons les passants. Ils ne me voient pas. Leurs yeux fixent une perspective loin derrière moi. Le bout de la rue, leur repas du soir. Leurs regards passent sur moi sans même s’accrocher au contour de ma silhouette, comme s’ils glissaient sur la paroi lisse de mon insignifiance. C’est bien la preuve. Je suis transparent, je n’ai pas de visage. Je suis le vent.

J’ai bien observé les gens. Je reconnais leurs gestes, leurs réactions. Quand ils sentent que je m’approche, ils ont ce petit froncement involontaire de sourcils, le signe d’un léger désagrément sans conséquence, qui fait presser le pas. Je pousse un peu plus près. Ils resserrent leur manteau, remontent leur col, rentrent les épaules et accélèrent de plus belle. Avec la peur que je m’insinue sous les pans de leur gabardine à frôler leurs poches. C’est bien moi, le vent.

Je suis un courant d’air. C’est dans ma nature de porter les odeurs. Je passe, les nez se plissent et les badauds soupirent. C’est sûr, les arômes d’ambre et de jasmin ne sont pas à ma portée. Moi, c’est plutôt les odeurs tenaces, les notes aigres, les parfums humains, les relents de la vie qui s’oublie. Toutes ces émanations qui portent loin. De toute façon, moi je ne sens rien, je suis le vent.

Je malmène les poubelles. Je secoue les caddies. Je m’engouffre dans les bouches de métro, les passages encaissés. Je me faufile. Entre les portes, par-dessus les grilles. J’aime bien aller souffler dans des coins abrités où je ne serai pas dérangé. Les habitants méfiants cadenassent leurs portes, calfeutrent leurs volets. Ils pensent que je pourrais m’infiltrer.

Parfois, je hurle et je tempête, blessé de tant d’indifférence, de tant de solitude. Mes bourrasques de colère passent sur la tête des gens et j’existe pour un instant. Regards de mépris, regards de pitié, ils me trouvent enfin un peu d’intérêt. Ils sont rares ces ouragans. Le quidam n’aime pas être dérangé par un vent capricieux, irascible. Et moi je n’aime pas être chassé. Alors mon courroux tombe. Je bougonne. Je me calme. Je me pose sur le bord du trottoir pour n’être qu’un souffle dans leurs chevilles. Assis. Sans bouger. Une coupelle à mes pieds avec quelques centimes jetés. Et une pancarte : « je suis le vent mais je voudrais manger ».

Texte écrit dans le cadre de l’atelier d’écriture « En roue libre » du 03/02/20

Retrouvez Carine sur son blog:

Conte de Noël: « Un sapin devant la mer » de Martine Dardenne (blog Planète Opalie)

Je me souviens de notre premier rendez-vous – car le hasard n’existe pas – comme si c’était hier. Mais jamais je n’aurais imaginé qu’il serait présent à nouveau, toujours au même endroit, un an après…

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« Dr Livingstone I presume ? »

Ce fut la phrase bête qui m’était venue à l’esprit

lorsque je le rencontrai l’hiver dernier.

En l’approchant de plus près je m’étais aperçue

qu’il s’agissait d’un sapin esseulé.

Que faisait-il, posé là, oublié, abandonné ?

Probablement un sapin de trop, un qui dérange …

A moins qu’il ne fut un sapin original,

las de trôner devant une cheminée.

Alors il se serait évadé…

Alors il serait allé voir la mer…

Je m’étais assise près de lui pour lui tenir compagnie

et nous nous racontâmes notre vie.

Il me conta sa forêt, je lui parlai des monts d’Ardèche.

Ensemble nous nous prîmes à rêvasser…

La mer, indifférente, continuait à valser.

Je lui dis qu’il était beau.

Il rougit de plaisir,

alluma ses lumières et fit briller son étoile.

Au loin, des gens s’aimaient,

ou faisaient semblant.

Un navire qui passait nous salua puis disparut dans le soir.

Quelques flocons tourbillonnèrent

et vinrent mourir sur le sable.

Il était tard, on m’attendait.

Le sapin esseulé s’éteignit doucement

Et la mer, indifférente, continua à valser…

………..

A vous qui passez : Joyeux Noël !

 

(Avec l’aimable autorisation de M.D à retrouver sur son blog Planète Opalie)

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